Dès que l’on prononce son nom, une chaleur invisible nous enveloppe. On voit aussitôt cette boule de feu suspendue au plus haut du ciel, généreuse et cruelle à la fois. Il éclaire nos vies, mais parfois il brûle nos peaux. On l’imagine jaune, éclatant, fidèle compagnon des jours heureux. Pourtant, il peut devenir insupportable, tyrannique. Jadis, je l’adorais ; aujourd’hui, je cherche davantage l’ombre, les douceurs d’une température qui ne blesse pas.

Après la pluie, il apparaît comme un messager de réconciliation. On l’appelle, on l’attend, on le supplie. Et quand il s’installe enfin, on se surprend à murmurer : « trop ». C’est tout le paradoxe du soleil.
Je le retrouve dans mille images : un pique-nique au bord d’un lac, une promenade tranquille avec mes chiens, une terrasse animée. Au Bélize, il m’accompagnait chaque jour, chaud mais jamais cruel, complice d’une vie douce. À Marseille, il s’impose autrement, tranchant, presque hostile, me rappelant que la lumière aussi peut fatiguer.
Les enfants le dessinent comme un rond jaune rayonnant, mais il est plus que cela : il est lever et coucher, promesse et adieu. Sur le lac Michigan, à Chicago, je l’ai vu se lever comme un miroir liquide qui s’embrase. Et sur la mer des Caraïbes, je l’ai regardé sombrer dans l’eau, en petites coupelles rougeoyantes, comme un géant qui s’éteint doucement.
Ma fille Zazie aime contempler ces couchers de soleil. Pour elle, ils sont un baume, une invitation au repos après les longues journées d’étude. Le soleil apaise, même quand il se retire.
Le lever du soleil, c’est comme une main douce qui entrouvre les rideaux du ciel, révélant peu à peu les couleurs cachées de la nuit.
Le coucher, lui, ressemble à une promesse chuchotée : il s’éteint en effilochant des draps rouges et violets à l’horizon, comme si le jour se couchait dans les bras de la mer.
Dans la jungle, son lever est une symphonie. Pas besoin de réveil : les animaux s’en chargent. Le coq des campagnes françaises ou, là-bas, au Bélize, le cri rauque du singe hurleur. Si petit et pourtant si puissant, il annonce l’aube à toute la forêt. Sa tribu lui répond, puis une autre, et de proche en proche la jungle entière s’éveille. Comme un chœur sauvage, chaque cri marque un territoire, comme l’aboiement d’un chien ou la porte que l’on ferme sur sa maison. Les hommes, finalement, ne font pas autrement.
Le soleil est ce rythme immuable, ce balancier entre vie et repos. Il fait lever les voix des singes, les chants des oiseaux, et il ferme leurs paupières au crépuscule. Il nous brûle, il nous nourrit, il nous fatigue et nous console.
Aujourd’hui, à Marseille, après les chaleurs qui m’écrasaient, je savoure son retour discret, adouci par l’automne. Comme une vieille connaissance, parfois trop envahissante, mais qu’on ne peut s’empêcher d’aimer.
Ajouter un commentaire
Commentaires