Mon amour, Je t’écris cette lettre comme on pose un cri sur le papier, comme on grave une promesse au creux du temps. Chaque mot est une brûlure, chaque phrase une révolte douce, une prière muette à ce monde qui voudrait nous séparer.
Ils disent que nous n’avons pas le droit de nous aimer. Ils disent que nos âmes ne doivent pas s’entrelacer, que nos cœurs battent au mauvais rythme, que nos dieux ne peuvent se croiser sans heurt.

Ils prononcent des interdits, ils élèvent des murs entre nous, comme si l’amour devait obéir à des lois que nous n’avons jamais écrites.
Mais ils ne savent rien de nous. Ils ne savent pas la puissance de ce que nous sommes. Ils ne connaissent pas la manière dont nos âmes s’attirent avec la force irrésistible des astres en collision, dont nos souffles se reconnaissent même dans le tumulte du monde. Ils n’ont jamais vu tes doigts frôler les miens avec cette tendresse qui renverse l’univers entier, ni entendu nos cœurs s’accorder dans une pulsation unique, comme si nous avions toujours existé l’un pour l’autre, bien avant que nos corps ne se croisent. Ils ne savent pas l’évidence de nos nuits, quand l’obscurité n’est qu’un refuge pour nos murmures et nos promesses, quand ton corps et le mien deviennent un langage que seule la fièvre de l’amour peut comprendre.
Ils ne savent pas les frissons qui parcourent ma peau quand tu me parles de tes rêves, quand nous imaginons nos vies entremêlées, construites pierre après pierre, défiant le rejet, la peur et les interdictions.
Ils ignorent la saveur des épices que nous mélangeons, le plaisir brûlant de goûter ce qui nous vient de l’autre, de se l’approprier, de le transformer en une saveur nouvelle qui n’appartient qu’à nous. Ils ne voient pas nos esprits s’élever dans l’émerveillement de l’art, dans les tableaux où nos regards se croisent, dans les musiques où nos âmes dansent en secret. Ils ne savent pas l’intensité du désir qui nous traverse, cette fureur de vivre, de nous aimer envers et contre tout, ce feu qui ne s’éteint pas mais s’embrase à chaque refus, à chaque menace, à chaque tentative de nous faire plier. Ils ne savent rien, et pourtant ils osent nous juger.
Nous sommes un mélange impossible et pourtant évident. Nous sommes la preuve que l’amour ne choisit pas son chemin, il le trace.
Je rêve de ce jour où nous n’aurons plus à nous cacher, où nos mains pourront se nouer sous la lumière sans crainte du regard des autres. Où nos familles comprendront que ce que nous bâtissons est plus grand que leurs peurs. Je veux qu’ils voient ce que nous voyons : un avenir où nos enfants grandiront entre deux cultures et deux langues, libres de prendre le meilleur des deux, nourris par la richesse de nos héritages, élevés dans l’amour, et non dans l’interdit.
Mais je sais que le chemin sera long. Je sais que nous aurons à nous battre, à essuyer des refus, à affronter le doute et la colère de ceux qui nous ont donnés la vie. Peut-être ne comprendront-ils jamais. Peut-être devrons-nous avancer seuls. Mais je préfère mille fois un exil avec toi qu’une vie enchaînée aux regrets.
Alors dis-moi, mon amour… Oserons-nous tout risquer ? Serons-nous assez fous pour croire que l’amour peut vaincre ce qui le nie ?
Moi, je n’ai plus peur.
Je t’aime. Je t’aime d’un amour que personne ne pourra effacer, ni enfermer, ni briser. Et si un jour cette lettre devait être notre seul souvenir, alors qu’il soit la preuve que nous avons aimé comme peu osent aimer : sans limites, sans frontières, sans chaînes.
À toi, toujours.
Cet exercice, proposé par Erik-Emmanuel Schmitt en collaboration avec The Artist Academy
Identifier la flamme et le carburant par Eric-Emmanuel Schmitt
Ecrivez une lettre d'amour que vous n'oserez jamais envoyer.
Les objectifs de ce défi :
- Provoquer les bons déblocages
- Nourrir son imaginaire
- Se mettre au service des idées à naître
- Apprendre à provoquer l'inspiration
- Développer une écriture authentique
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