Il est 20h. L’heure de notre rendez-vous. Un frisson me traverse, comme un courant électrique sous la peau.
Je pousse la porte du restaurant. Une chaleur douce m’enveloppe aussitôt, imprégnée de lumières tamisées et d’effluves enivrantes—éclats d’épices, volutes beurrées, fumées discrètes qui s’élèvent des assiettes.

Le murmure des conversations se fond en une mélodie lointaine, ponctuée du tintement des verres et du glissement feutré des pas.
Et puis, je le vois.
Nos regards se croisent.
Le reste disparaît.
Une décharge me traverse, brutale, incandescente. C’est comme si l’air s’était épaissi entre nous, comme si tout ce qui nous sépare venait de s’effacer d’un coup. Ce regard n’est pas un simple échange fugace, c’est une étreinte invisible, un appel silencieux. Il est ancré, vibrant, impossible à briser.
La chaleur qui monte en moi est insidieuse et troublante. Mon cœur cogne dans ma poitrine, désordonné. Mes doigts se resserrent malgré moi, cherchant un ancrage, une issue à ce flot d’émotions qui m’envahit. Mais il n’y a pas d’issue. Il n’y a que ce regard.
Un mois d’absence, de silence, d’attente. Et en un instant, tout revient, amplifié.
Mes joues brûlent, mon souffle vacille. Lui aussi est immobile. L’espace entre nous n’est plus qu’un champ magnétique, un fil tendu, prêt à se rompre ou à nous attirer l’un vers l’autre.
Les bruits autour s’effilochent, se mêlent en un murmure indistinct. Les serveurs glissent entre les tables, les assiettes fument, les conversations flottent, mais tout cela s’éloigne. Le monde poursuit son mouvement, et pourtant, il semble s’être figé.
Il ne reste que lui. Que moi.
Ce regard.
Un souffle suspendu entre nous, chargé de tout ce qui n’a pas été dit, de tout ce qui n’a jamais cessé d’exister. Il m’enveloppe, m’effleure, s’ancre en moi avec une douceur brûlante. Il murmure ce que ni lui ni moi ne disons à voix haute.
Il n’y a plus d’attente, plus de questions, plus de distances à combler. Il y a juste cette force qui nous lie, cette chaleur qui nous traverse et s’installe, profonde et évidente.
Nos yeux se trouvent, se reconnaissent, s’embrassent avant même que nos corps ne bougent.
Et dans cet instant figé, je sais.
Je sais qu’il sait aussi.
Véro Infini
Cet exercice, proposé par Julien Barret en collaboration avec The Artist Academy
Retranscrire émotions et sensations
Décrivez un premier regard amoureux sans utiliser le mot "amour"
Les objectifs de ce défi :
• Maîtriser la description des sensations physiques
• Apprendre à montrer plutôt qu'à dire
• Enrichir son vocabulaire sensoriel
• Développer une écriture incarnée
• Éviter les clichés dans la description des émotions
Ajouter un commentaire
Commentaires